This land seems born to raise up dead things ✧ Elvira

Izeghar.
Les dunes de sable sous un soleil d'été indien, si éclatantes que cela en devenait presque douloureux. Jin aurait voulu pouvoir en profiter. Tendre son visage sous la caresse des rayons ardent. Et arrêter de penser. Mais son labyrinthe l'engloutissait. Une fois ses paupières closes, il y entrait, s'y perdait et n'en retrouvait jamais le chemin. Il trébuchait, s'enlisait à chacun de ses souvenirs, butait à chacun de ses choix de vie.  Et son serment lui apparaissait à chaque embranchement, chaque détour, chaque cul-de-sac. Il fuyait en courant pour mieux les retrouver quelque mètres plus loin.

Il s'en saurait assommé lui même si l'inconscience avait pu faire taire ses pensées et leur violence. Mais à quoi bon? Lorsque tout ce qui vous entourait vous rappelait le pampre de vos dérélictions.

Mais tout ce silence avait quelque chose d'étrange. Etrange et inquiétant. La manière dont le vide semblait absorbé toutes les clameurs de la grande ville, épongeant la révolte qui grondait, atténuant les contours de l'inévitable. Il n'était pas sûr d'aimer ça. Une révolution silencieuse n'était pas quelque chose d'aisé à prévoir. Il préférait garder une névrose sous contrôle, les siennes comme celle des autres. Qu'adviendrait-il s'ils baissaient leur garde? Est ce que tout reviendrait leur lacérer le visage?  

Et le contrôle, c'est tout ce qu'il leur avait échappé. Tout ce qui se délitait sous un règne chaotique qui ne saurait duré. Jin n'avait jamais été de ceux qui souhaitaient le façonné. La politique, le pouvoir, les complots, tout ça était bien loin des considérations de celui qui s'était usé à cette vie de vagabond. Il avait juste souhaité offrir au monde quelque chose de meilleur. Mais peut-être - peut-être était-il déjà trop tard, peut être que la brume étrange qui leur avait déjà infiltré le cerveau ne s'estomperait jamais, que toutes cette fièvre, toute cette haine s'inscrirait jusque dans les chromosome de leur ADN.
Assimilé par leurs coeurs déjà gangrénés.  

— Here you are.

La porte s'était ouverte d'un coup, assez distinctement pour le tirer du fil de ses réflexions, pas assez pour qu'il ne se lève à l'arrivé de la jeune femme. Elvira Havillard portait cette dureté propre aux gens de sa caste. Elle semblait si grande, si hautaine lorsque son regard vous abîmait que vous ne pouviez douter une seule seconde du nom qui lui incombait.  Jin pressa sa joue contre la paume de sa main et détourna le regard. Elle semblait détestable Elvira, elle n'y pouvait rien, c'était tout ce qu'elle exprimait sans même le vouloir. Sa naissance, ses compétences, tout ça lui aurait dû lui apporter le faste d'une couronne qu'elle ne portait pas encore et qu'elle ne porterait sans doute jamais, un prestige qui aurait du lui revenir et qu'elle souhaitait récupéré à tout pris. Si c'était l'avidité qui avait un jour poussé la princesse à s'allié à la vermine que le fae représentait, c'était l'intérêt qui poussait la barque du quelque chose qui les reliait.

— I wouldn't say that you're late even if you know it.

A croire que le faire attendre était devenu une norme à laquelle il ne pouvait déroger et à laquelle il finissait par s'habituer.

— Water?

Il engloba d'un vague mouvement du poignet la table basse chargé d'un broc d'eau et des quelques verres qu'il avait pensé à emporter. Tout pour tromper la chaleur écrasante d'un désert qui ne cherchait qu'à les étouffer.