let the past die (valois)

let the past die

@victoria valois @aruna valois @gaspard valois

Le soleil couchant baigne Valréal de reflets zinzolins alors que les derniers rayons de l’astre se reflètent sur les larges vitres de l’atelier de couture dans lequel d’affaire encore la tignasse rousse. Grognements de dépit rompant le silence planant sur le Dashing Fox. À genou à même le sol, la jeune fae est trop occupée à ramasser les dernières chutes de tissu restés à terre pour se préoccuper de ce que d’aucuns pourrait penser en la surprenant dans cette posture. Cheveux ébouriffés, mèches emmêlées de fibre de textiles, joues rougies par une colère enfantine qu’elle ne tente même pas de maîtriser. Léonie est, en cet instant, à mille lieux de l’image qu’à la fois la famille Valois et le prestigieux établissement dans lequel elle se trouve essayent de promouvoir.

Attrapant enfin les derniers oripeaux ayant glissé jusque sous les tables de couture, elle se relève sans grâce, genou endolori par le contact prolongé du sol et jambes engourdies. Un piaffement n’ayant rien de convenu ni de maîtrisé lui gonfle les joues avant que l’air ainsi expulsé n’aille se perdre, emportée par la douce brise du mois d’avélie s’insinuant par la fenêtre entrouverte. Elle jette rageusement les chutes de tissus qu’elle vient de capturer dans une corbeille prévue à cet effet, lui lançant par la même des regards assassins, comme si l’objet de son ire se trouvait placardé au fond de la poubelle. La fenêtre claque contre son chambranle sous la pression de la paume fae. Sans nul doute aurait-elle dû la laisser ouverte, laissant ainsi la boutique en proie aux vagabonds écumant les rues de Valréal à la recherche de quelques larcins. Si ces joues rosissent à cette pensée, il y a fort à parier que c’est à cause de la honte qui la submerge un court instant. L’idée de songer à telle bassesse alors que la vile a déjà assisté il y a quelques mois à la disparition de ladite boutique, sans mot dire. Parfois, il lui semble encore sentir l’odeur âcre du tissu et des teintures emportés par le brasier alors qu’elle arpente les couloirs nouvellement restaurés de l’atelier. Conscience moralisatrice qu’elle s’évertue à ignorer ; quelle différence cela fait-il désormais ? Elle n’est pas le pyromane, seulement le témoin d’une catastrophe imprévisible et irrésistible. Il ne fait d’ailleurs aucun doute que depuis cet événement Victoria paye quelques employés pour surveiller son précieux commerce à la nuit tombée. Le laisser ouvert aux quatre vents n’aurait donc aucun intérêt sinon celui de se voir reprocher son manque d’application.
Victoria, qui avait prétendu avoir une course urgente à faire ici ou là, laissant l’employée indésirable s’occuper de ranger l’atelier alors que tous les autres avaient déjà déserté les lieux pour s’en retourner au confort de leur foyer. Elle aussi avait voulu pouvoir s’enfuir bien plus tôt, profiter du temps ensoleillé et du printemps revenu pour vagabonder ici et là. Au lieu de cela, on lui avait trouvé une montagne de choses à faire, ses regards désespérés lancés à la dérobé aux fenêtres entrouvertes l’avaient sans aucun doute trahi et elle ne pouvait plus que s’en prendre à elle-même de n’avoir mieux appris à jouer la comédie.

Sa fureur quelque peu apaisée à la pensée de la journée de labeur terminée, l’ouragan se tamise directement du pas de l’atelier à celui du Palais des Roses. Que de mana gâché pour huit-cents mètres à parcourir. L’étourdie n’y songe jamais, trop heureuse qu’elle est d’enfin pouvoir se déplacer à sa guise, de tamiser au nez des humains faisant le guet devant le palais. Pourtant, aucun regard courroucé ne l’accueille ce soir, les gardes semblent bien trop préoccupés pour lui manifester leur dégoût habituel. Les portes en bois qu’elle pousse s’ouvrent sur un hall désert et sombre, son pas résonne étrangement sur le marbre. Il y a bien longtemps qu’elle n’a pas connu le château ainsi, déserté et silencieux. Peut-être le gratin de la société humaine avait-il mieux à faire ce soir-là, songe-t-elle avant d’atteindre le deuxième étage de la demeure, miettes de pain sont les Valois devaient désormais se contenter. Sur le pas du salon, lui aussi plongé dans une étrange obscurité, elle ose demander « Ma tante ? Êtes-vous là ? » Le temps que ses yeux s’habituent à l’obscurité et voilà qu’apparaissent les silhouettes des siens, têtes baissées et airs maupiteux. Elle laisse échapper une exclamation où se mêle surprise et dégout. « Mais enfin que faites-vous ? Que se passe-t-il ? » Et alors que les questions se forment sur ses lèvres roses, lui revient en mémoire le comportement erratique des siens plus tôt dans la journée, le 11 avélie …

(c) DΛNDELION