bloody ends

i'm gonna be free and i'm gonna be fine. but maybe not tonight.

Et merde. C'était pas censé se passer comme ça. Tu t'étais renseignée, les lieux devaient être déserts. Mais t'as eu le droit à un comité d'accueil, Aska. Alors, lorsqu'ils ont brandit leurs armes tu t'es défendue. La voleuse qui se mue en meurtrière ; leurs vies plutôt que la tienne. Leurs corps qui chutent un à un sur le sol du vieil entrepôt sous la lame de la corbac. Mais tu t'en es pas sortie indemne, Aska. L'enveloppe criblée de balles, plaie béante qui orne tes côtes. Gamine misérable qui se retrouve dans un sale état. La première fois depuis longtemps. Depuis que l'Armée Rouge t'es tombée dessus alors que t'essayais de te faire discrète, que tu cherchais à les fuir. Et t'as mal à en mourir. T'as l'impression de voir la terre tourner autour de toi, t'as l'impression de voir ton âme s'échapper par les blessures qui se dessinent sur ton épiderme. L'esprit qui s'embrouille alors que le carmin continue de fuir tes veines.

Corps qui se traîne difficilement à travers les rues désertes de la ville maudite. Manquant de s'effondrer sur les pavés par moment. Une vision qui commence lentement à s'effriter. Des vêtements souillés par le vermeil. Il ne te reste plus que quelques mètres à faire mais même ça, tu sais pas si t'es capable de le faire. L'enveloppe menace de lâcher à tout moment. Cruel retour de bâton pour celle qui a fait du crime son gagne pain. T'as presque l'impression de mériter ce qu'il t'arrive. Comme si les Aevhen rappelaient à eux l'âme de celle qui avait ôté trop de vies.

Lorsque t'arrives enfin à ta destination, tu te fracasses contre l'entrée. Espérant que le bruit causé sera suffisant pour attirer l'attention de ton amie. T'as même plus la force de lever ton bras pour frapper à sa porte. Et tu préférerais éviter que Cosima ne découvre ton cadavre au petit matin. T'as plus qu'à attendre, à prier. Et t'as l'impression que les minutes durent des heures, que Vyrr s'amuse à altérer ta vision du temps. Jusqu'à ce que la porte ne s'ouvre enfin. « T'as pris ton temps », que tu lances en essayant d'esquisser un léger sourire. Au moins, tes blessures ne t'ont pas ôté ton humour. Mais t'as du mal à articuler, Aska. Paroles à peine compréhensibles qui s'échappent de tes lèvres. Cerveau endolori par les marques sur ton corps. « J'crois que j'vais avoir besoin de tes talents. » T'as cruellement besoin d'un médecin mais tu refuses de te rendre dans un hôpital. Épée de Damoclès qui pèse au-dessus de ton crâne. Parce que t'es apostate et que t'as fuis toute ta vie. Tu prendras pas le risque de te faire choper maintenant.

Loin des siens, de cette famille qui la scrute, qui la juge et qui finit toujours pas la trouver cassée, inutile, défectueuse, elle s’épanouit Cosima. Lunaris est pour elle une bouffée d’air frais. Suffisamment loin pour pouvoir respirer, suffisamment près pour qu’on ne l’accuse pas de déloyauté. Elle en fait pourtant tellement pour eux. Jure tous les jours loyauté à une cause en laquelle elle n’est pas sûre de croire uniquement pour tenter de mériter une once de leur respect. Elle devrait savoir pourtant, que ça ne changera pas, qu’elle peut essayer de toute ses forces, crier, supplier, ils ne regarderont jamais au-delà de ceux qu’ils jugent être une difformité. Les esprits faibles changent rarement, trop bornés pour chercher au-delà de leurs préconceptions. Et sa famille n’a jamais su s’adapter, coincés dans les souvenirs luisants d’un temps qui n’est plus, courant après le passé comme s’ils pouvaient en un simple claquement de doigts recréer Mysrathan.

Elle sait qu’ils ont tort mais elle ne dit rien Cosima. Même si rebâtir à l’identique est une possibilité, cela ne ferait que laisser les mêmes fissures sur les fondations. Celles qui ont conduites à l’effondrement de tout ce qu’ils tenaient cher. Une main lasse placée contre son front avant qu’elle ne vienne saisir sa tasse de thé pour en prendre une gorgée. Ses yeux viennent s’égarer vers la rue qu’elle peut apercevoir par la fenêtre. Chez elle. Loin d’eux. Elle a son propre cabinet, ultime symbole pour elle d’une réussite dont elle ne peut même pas se vanter. Au-dessus, son propre appartement, loin de pouvoir ne serait-ce qu’égaler le domaine familial situé à Ashmeria. Mais cet espace lui appartient. A elle seule. Son argent et non celui du nom familial. Quelque chose que personne ne lui prendre, lui refuser. Elle l’a gagné à la force de son travail et non d’une influence quelconque.

Un autre soupir, cette fois peut-être plus déterminé. Soudain ses yeux se froncent. Difficile à dire dans l’obscurité mais il lui semble presque apercevoir une silhouette se dirigeant vers son bâtiment. Etrange à une heure ou mêmes les oiseaux les plus tardifs sont couchés. Cosima elle-même dormirait à poing fermés si elle n’avait pas décidé de relire une antépénultième fois les notes qu’elle et Basil ont pu rassembler. Elle sursaute quand un bruit sourd retentit contre sa porte. Hésite. Aller voir quitte à se mettre en danger ? Rester quitte à abandonner quelqu’un ? Après de longues secondes, elle se décide enfin à descendre, une main serrée contre sa poitrine.

Lorsqu’elle ouvre la part, un corps frêle vient presque lui tomber dessus. Du sang qui vient tâcher sa chemise de nuit blanche, des cheveux qui viennent frôler son nez. C’est la voix qui retentit qui lui donne la réponse. « Aska ! ». Panique un instant, avant que le professionnalisme ne reprenne le dessus. « Par Cymera que t’est-il donc arrivé ? » Un bras passé autour de la cage thoracique et elle l’entraine dans son cabinet. Elle allonge son amie sur la table avant de faire une inspection de ses blessures. Le tissu des vêtements découpés jusqu’à ce qu’elle puisse avoir accès à chacun des points d’impacts. Des balles. Sans un bruit, la blonde vient appuyer des compresses contre le saignement. Se retourne pour farfouiller dans ses armoires jusqu’à revenir, un verre à la main. « Bois ça, pour la douleur. » Un anesthésiant. Ils auraient mieux ailleurs sans doute, mais elle n’est guère équipée pour les urgences, Cosima.

De nouveau la tête se penche au-dessus des plaies. Rien de vital par chance. Des balles à retirer fichées dans les muscles qu’il faut maintenant recoudre. Les minutes passent et elle ne parle pas, concentrée uniquement sur le corps pâle allongée sur la table. Les minutes deviennent heure avant qu’elle ne puisse enfin appliquer cataplasme et baume contre les plaies. Puis il faut encore farfouiller, mélanger, préparer. Elhara lui dit sans cesse que la médecine fae met trop de temps. Elle a peut-être raison. Elle retire le verre de la main de la blonde, pour en placer un autre. « Pour le sang perdu. » Mais Aska écoute à peine, aussi fragile que la poupée à laquelle elle semble avoir volé les traits. Il faut l’aider à boire et puis la tête retombe, la corbeau plongée dans l’inconscience.

La nuit est passée à veiller. Surveiller. Chaque minute fixée sur l’état de son amie jusqu’à ce que la respiration devienne plus calme. Posée. Quelques minutes de sommeil sont alors grappillées. Le matin venu, Cosima change les pansements, observe les plaies. Les paupières d’Aska viennent papillonner une seconde avant de s’ouvrir. Un soupir soulagé s’extirpe des lèvres de la fae de l’automne. « Tu m’as fait une peur … comment te sens-tu ? » Elle se relève un instant pour apporter à boire à la blonde.

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AVATARS PAR Corvidae

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Tes souvenirs sont flous, Aska. Quasi inexistants à partir du moment où ton amie t'ouvre sa porte. T'es plus capable de déceler le vrai du faux. La vague impression que ce n'était qu'un songe, un mauvais rêve dans lequel la douleur était pourtant bien présente. Et après ça, le trou noir. Tu n'te rappelles plus de rien. Gamine qui se réfugie dans les bras de Morphée. Sombrant dans un sommeil profond où, une fois n'est pas coutume, nuls démons ne viennent la poursuivre.

Et lorsque t'ouvres finalement les yeux, Cosima se trouve toujours à tes côtés. Inquiète. Elle se relève pour t'amener de quoi te désaltérer. Alors tu bois. Difficilement. L'eau cristalline peine à rentrée et, plus d'une fois, t'as bien l'impression que tu vas tout recracher à la figure de ton amie. T'essuies ensuite tes lèvres du revers de ta manche avant de planter ton regard dans celui de l'automnale. « Désolée. » T'es pas habituée à ce qu'on s'inquiète pour toi, Aska. Parce que t'as jamais vraiment compté pour personne. Gamine abandonnée à de trop nombreuses reprises. Âmes qui vont et viennent, s'amusant avec toi comme un marionnettiste joue de ses pantins. Et un jour, ils s'en vont définitivement, sans jeter un seul regard en arrière. Et puis, il y a Cosima et Isang. Qui ont un jour débarqué dans ta vie et qui n'en sont plus jamais reparties. Les seules qui ont encore toute ta confiance. Celles qui te donnent un peu plus foi en autrui. Qui t'incitent à penser que le monde n'est peut-être pas aussi terrible que ce que tu veux bien penser.

Tu t'étires et tu sens encore une douleur dans tes muscles, qui t'arraches un rictus. « J'ai l'impression de m'être faite piétinée par un mosopus. Mais ça va. J'm'en remettrai. » Comme toujours. T'as sans doute déjà vécu bien pire. La Mort qui te tourne autour dès ton premier souffle, s'amusant à semer le chaos dans ta pitoyable vie. Au moins, ces balles n'étaient pas renforcées au lyrium. Le mal de ton peuple. L'impression terrible qu'on te vide de ton âme alors que tes pouvoirs s'estompent. Comme si tu perdais une partie de ton être pour la soumettre à l'espèce humaine. « Merci. Heureusement qu't'étais là. » T'aurais sans doute fini par crever dans une mare de sang sans elle. Volonté de survivre qui la prend au tripes à chaque fois. Gamine qui refuse de s'incliner face à la faucheuse. Pourtant, t'es persuadée qu'elle viendrait te soulager du fardeau qu'elle a placé sur tes épaules lorsque t'étais qu'une gosse. Mais t'arrives pas à abandonner. À te laisser mourir. L'illusion qu'il te reste encore quelque chose à accomplir.

Léger rire qui s'échappe de tes lippes alors que ton regard se perd dans l'appartement de ton amie. « J'ai c'que tu m'as demandé, d'ailleurs. Dans mon sac. » Un faible signe en direction d'une besace posée non loin. T'es encore trop faible pour pouvoir te relever. « Enfin, j'espère que c'est bien ça. » Parce que t'as été prise par surprise et que t'as du te dépêcher de prendre ce que tu pouvais avant qu'on ne te tombe dessus. T'espère ne pas t'être emmêlée les pinceaux dans l'urgence.

La fatigue vient brûler contre son crâne, les heures ont été longues, passées à surveiller les plaies, la fièvre, a simplement garder les yeux grands ouverts au cas où quelque chose – n’importe quoi – tournerait mal. Les cernes sont noires sont les yeux et ceux-ci se font petits, la fatigue fait craquer les os mais en cet instant peu importe. Aska respire, ses plaies ont déjà meilleures mines que la veille. Pas de quoi faire un triomphe non plus, évidemment. Des balles sont des balles et il lui faudra quelques jours de repos avant de pouvoir aller gambader comme si de rien n’était. Fort heureusement, Cosima à de l’espace à revendre, et tout ce qu’il faut pour garder la fae en bonne santé. Alors quand les yeux clairs papillonnent, la blonde ne peut que sourire, quand elle boit, bon an, mal an, renversant autant d’eau qu’elle en avale, elle essuie patiemment.

Elle aurait pu mourir.

Mais ça n’a pas été le cas. Une pointe de fierté pour celle qui doute constamment de ses talents, pour celle qui n’arrive pas à avancer dans sa quête. Demain elle ne soignera peut-être pas le strychnos mais aujourd’hui au moins elle a sauvé une vie. Elle secoue la tête lorsqu’Aska s’excuse. « Pas besoin de t’excuser. » Elle l’aide doucement à se mettre en position assise, adossée contre les oreillers, un confort minimal pour l’aider à mieux se remettre. Plus que jamais elle est heureuse d’avoir pris la décision d’ouvrir la porte, si elle n’avait rien fait, la vue du cadavre d’Aska contre son parvis l’aurait hantée à jamais. Au lieu la fae se tient devant elle, pâle due à la perte de sang, frêle à cause de l’épreuve mais elle respire. Et c’est une victoire en soit.

Le rire qui sort de ses lèvres est froid, mais soulagé. « Les balles ne pardonnent pas. Et oui tu t’en remettras. Sous bonne surveillance. Pendant quelques jours. » Elle lève un sourcil et soudainement les yeux se veulent persistants. « Tu vois ce que je veux dire ? » Elle sait Aska avide de liberté, elle sait qu’elle n’aime pas rester enfermée dans une pièce, que ses missions sont nombreuses et que les corbeaux comptent sans aucun doute sur elle. Qu’à cela ne tienne. Si Cosima doit l’attacher pour s’assurer qu’elle continue sa convalescence de la manière recommandée elle le fera. Aska pourra toujours la maudire plus tard, une fois remise et en bonne sympa.

Elle hoche la tête d’un air docte. « Oui heureusement que j’étais là. Sinon tu te vidais de ton sang. Alors dit-moi … que s’est-il passé ? » Dans quelle galère t’es-tu embarquée ? Elle n’a que peu d’amis, Cosima, faute de confiance en les autres, faute de sociabilité, faute de normalité. Alors elle n’a pas envie que le peu d’entre eux qu’elle possède finisse six pieds sous terre …. Du moins pas tant qu’elle n’est pas assez douée pour les ramener. Alors quand Aska évoque l’objet qu’elle est censée posséder les grands yeux bleus s’écarquillent avec horreur, lui donnant un air plus lunaire que jamais.

« Tu as risqué ta vie pour … un objet … pour moi ? » Le ton est lent, chaque syllabe parfaitement articulée. Elle a envie de hurler, Cosima. De prendre Aska par les épaules et de la secouer jusqu’à ce qu’elle réalise sa bêtise. Hypocrite quelque part puisqu’habituellement elle la paie pour ce genre de mission, mais c’est la première fois qu’elle les voit tourner mal, et la peur s’agrippe à son cœur. « Je ne le dirais qu’une fois. Aucun artefact que j’ai pu te demander ne vaut un risque aussi inconsidéré. » Là encore ce n’est pas forcément vrai, le problème est qu’il est difficile de connaitre la valeur d’un vieux grimoire avant de l’avoir lu et que jusqu’à présent, beaucoup se sont révélés inutiles. « La prochaine fois laisse tomber ou reviens mieux préparée. Je préfère ne pas avoir ça » elle pousse du pied la besace « et te savoir en vie. »

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Blessures encore douloureuses sur ton thorax, sur tes côtes. Le corps encore endoloris, qui peine à se remettre des épreuves de la nuit dernière. T'aurais pu mourir Aska, t'en as conscience. Mais la faucheuse te poursuit depuis que t'as poussé ton premier souffle. Comme une malédiction dont tu n'arrives pas à te défaire. T'as toujours eu la mauvaise habitude de flirter avec la mort. Parce qu'il n'y a que comme ça que tu te sens réellement exister. L'impression de reprendre le dessus sur ta pitoyable existence en prouvant que t'es plus forte que la Mort elle-même. Si t'es pas six pieds sous terre après tout ce que t'as vécu, ce ne sont pas quelques balles – bien placées tu dois l'admettre – qui t'achèveront. Gamine idiote qui finira par brûler ses ailes de corbac.

Cosima t'annonces qu'il te faudra quelques jours de repos pour te remettre de tes blessures, et tu manques de lever les yeux au ciel. T'aimes pas être inactive, elle le sait bien. Il n'y a rien de pire pour réveiller les démons qui sommeillent dans un coin de ton crâne. « Ouais, ouais » que tu lâches tout en hochant vaguement la tête. Corbeau qu'on prive de ses ailes. Gamine que l'on prive de sortie. Tout ces pigeons qui attendent d'être déplumés et qui vont lui échapper. C'est Rax qui sera content d'apprendre la nouvelle.

Un soupir d'échappe de tes lèvres face à la réaction de ton amie, lorsque tu lui apprends que t'étais partie chercher l'un des précieux objets qu'elle convoite. T'as presque l'impression qu'elle exagère dans sa théâtralité. Elle te dit qu'elle préfère que tu lui reviennes en vie, plutôt que tu ne meurs bêtement par sa faute. Elle s'inquiète, tu le sais. Mais elle s'inquiète s'en doute trop. « Je sais bien. » Tes doigts viennent gratter ton front. Gamine gênée, qui n'a jamais été douée pour exprimer ce qu'elle ressent. « Mais c'est pas comme si j'avais prévu de finir dans cet état-là. » Généralement, tu t'en sors plus facilement. Mais ils étaient trop nombreux pour que tu puisses les gérer seule. Et apparemment, tes pouvoirs ont décidé de se faire la malle pendant ta mission ; gamine incapable de faire appel à Vyrr dans ce fichu entrepôts. Tes capacités trop instables pour que tu puisses véritablement compter là-dessus. Tu t'en serais pourtant beaucoup mieux sortie si t'avais été capable de figer ces salopards.

T'hausses les épaules en te remémorant les souvenirs de la veille. « En tout cas, vu comme l'endroit était bien gardé, 'doit y avoir des trucs intéressants par là-bas. » Sous-entendu à peine caché : t'y retourneras. Tous les moyens sont bons pour enrichir les canailles des rues. Et avant même que Cosima ne puisse protester, tu ajoutes : « J'serai pas seule cette fois. » Tu sais déjà que l'appât du gain intéressera tes compagnons d'infortune. Vermine d'Ozira amassant l'ozeille de sa populace alors que les puissants sont occupés ailleurs. Profitant que leurs regards soient dirigés ailleurs pour mieux vider leurs poches. « Tu devrais savoir qu'on ne me tue pas aussi facilement. » Gamine qui voulait autrefois se laisser mourir. T'as bien failli te laisser entraîner dans l'embrassade macabre de la fossoyeuse. Et pourtant, même elle n'a pas voulu de toi. Détournant son regard alors que tu la suppliais de te prendre. « Il ne m'arrivera rien. J'te l'promet. » Rien n'est moins sûr. Tu vis une existence dangereuse, Aska. Gamine faite de crasse et de sang. L'ombre de la Mort qui te menace trop souvent.

Les yeux sont plissés, fixés sur le visage poupin. Elle connait un peu trop Aska, suffisamment pour savoir que celle-ci n’est pas habituée à l’inactivité. Suffisamment pour savoir qu’à la première occasion la blonde serait prête à partir sans un regard en arrière. Lorsque la fae lui donne une affirmation qui semble des moins sincères son visage se fige un instant. « Ce qui veut dire que je veillerais personnellement au bon déroulé de ta convalescence. » Elle se rapproche un peu, les bras appuyés sur le lit de fortune. « Et que si je dois te garder prisonnière le temps que tu te remettes … je le ferais en un battement de cœur. » L’humour n’a jamais fait partie des qualités de Cosima, et d’autant moins lorsqu’il s’agit de blessures présente sur le corps d’une amie. Elle ne l’a laissera pas partir, la fleur au fusil, sans se rendre compte des risques qu’elle prend. Elle sait le danger auquel son appartenance l’expose et ne peut que tenter de lui donner conseils et traitements lorsqu’elle en a besoin. Mais cette fois c’est différent. Parce que la mort était si près. Parce qu’elle se sent responsable, Cosima.

Après tout, c’est pour elle qu’Aska à fait cela.

Il y a un soupir qui lui échappe. « Tu dois avoir faim, je vais t’apporter quelque chose. » Rien de trop lourd, juste du pain et un potage. Piètre petit-déjeuner certes, mais ça tient au corps, c’est facile à digérer et de toute façon la corbeau n’est en aucune position de râler. Quelque part, c’est ainsi qu’elle préfère ses patients, Cosima. Elle a toujours du mal avec leurs états d’âmes, leurs simagrées. Elle les préfère quand ils savent qu’ils n’ont pas d’autre choix que d’écouter. Quand ils acceptent sans un bruit et viennent placer en elle une certaine confiance. Pas surprenant finalement pour elle qui préfère passer son temps à travailler sur des cadavres. Elle est habituée au silence et à ceux qui ne peuvent pas répondre. C’est souvent une perte de temps que de se battre pour expliquer une évidence.

La blonde roule des yeux. « Je pense que personne n’anticipe réellement le fait d’être criblée de balles. Mais ça prouve que tu n’as pas assez bien fait tes recherches. » Le ton est pincé. Il faut dire qu’elle est tout sauf impulsive, Cosima. Elle passe des heures à réfléchir, à rechercher la meilleure des stratégies à adopter avant de décider quoi que ce soit. Certains verraient cela comme une perte de temps, elle en revanche y trouve une forme d’auto-préservation. Et d’une certaine manière cela paie, puisqu’elle ne s’est jamais retrouvée en réel danger. Un soulagement d’une certaine façon. Si seulement Aska pouvait parfois d’avantage lui ressembler.

Les yeux qui se plissent de nouveau. Tout sauf sotte, Cosima. «  Non, non. Tu n’y retourneras pas pas vrai ? » Une pause, les épaules qui se crispent et le regard qui se tends. « Pas vrai ?! » Une pointe d’énervement dans la voix. « Tu t’en es à peine sortie seule, je doute qu’une personne de plus face la différence ! Et je ne veux pas à avoir deux personnes à recoudre la prochaine fois ! ». L’indignation est palpable, la voix est un murmure furieux lorsqu’elle continue. « et certainement pas Isang, je t’interdit de mettre un pied là-bas avec elle ! » Les deux savent parfaitement que l’interdiction n’est rien d’autre qu’une jolie parole balancée dans le vent, Aska n’en fait qu’à sa tête et ne l’écoutera que si cela lui convient … mais elle ne peut pas, ne pas essayer, Cosima. « Permet moi de te contredire très chère. Sans moi on t’aurait tué aussi facilement. Et malheureusement je ne peux pas me permettre de te suivre dans chacune de tes entreprises » Foireuses qu’elle rajouterait si elle avait été moins bien élevée.

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L'hivernale qui joue les enfants sages. T'essaies de rassurer ton amie comme tu le peux, Aska, mais tu sais qu'elle n'est pas dupe. L'appât du gain qui anime ton âme depuis trop longtemps, vermine qui croupit dans les bas fond d'Ozira, qui n'a de cesse de chercher à s'enrichir. Parce que tu côtoies la crasse depuis bien trop longtemps — et qu'il est l'heure que la roue tourne. « Oui m'man » que tu laisses échapper de tes lèvres. Légères moqueries à l'encontre de celle qui a passé sa nuit à veiller sur toi. L'automnale pour te rattraper lorsque tu chutes, encore et encore. Et tu lui en es reconnaissante — mais t'es trop maladroite pour le lui dire sans le cacher sous des moqueries. T'as toujours préféré enfermer tes sentiments au plus profond de ton cœur. Par peur que l'on ne te quitte si tu venais à les dévoiler. Gamine abandonnée à de trop nombreuses reprises qui en porte aujourd'hui encore les séquelles. T'accueilles la proposition de repas avec joie — ton ventre crie famine et t'es même plus sûre d'avoir eu le temps d'avaler quelque chose la veille, avant de te rendre à l'entrepôt. Souvenirs légèrement flous de la nuit précédente. Seule reste la douleur qui marque encore ta chair. Un souvenir que tu finiras par oublier tout aussi facilement. Une mission parmi tant d'autres. Et le fait que t'aies faillit y passer ne la rend pas plus marquante pour autant.

Mais les réjouissances sont de courte durée ; l'amie reprends ses sermons. Et tu lèves une fois le plus les yeux au ciel. Il était évident que personne ne se prenait intentionnellement des balles. C'était ce que toi et ton ironie aviez tenté — sans succès — d'insinuer. « J'y vois surtout une preuve que cette caverne renferme plus de trésors que c'que j'pensais. » Léger haussement d'épaules pour accompagner tes paroles. Ton amie finira par te tuer de ses mains pour ton insolence. « L'avantage, c'est qu'on connait maintenant quelles méthodes ils emploient pour protéger leur butin. » La réflexion qui s'échappe de tes lippes. T'es néanmoins persuadée que leur arsenal aura au moins doublé d'ici votre prochaine rencontre. Pour mieux se protéger de la racaille dans ton genre. Gamine idiote mais futée. De ceux qui ne possèdent nulle culture en dehors de celle que l'on se forge parmi les ruelles obscures d'Ozira.

Tu reprends une gorgée d'eau alors que t'écoute les paroles de ton interlocutrice. T'y retourneras pas tout de suite, c'est un fait — après tout, elle t'a bien fait comprendre qu'elle te garderait prisonnière si elle le devait, pour s'assurer que tu suives ses instructions à la lettre. Mais lorsque tu seras guérie ? C'était là une autre histoire — l'appât du gain bien trop tentant pour une gamine vit de ses larcins. « Compris. Isang ne viendra pas », que tu réponds simplement. Et tu sais déjà que la métisse t'en voudra pour ça. Mais tu n'as qu'une parole, et t'es prête à renoncer à la présence de ta sœur d'armes si cela permet à ton amie de dormir sur ses deux oreilles. « Et encore une fois, je te remercie pour ton aide. » Car aussi fière que tu es, tu sais que Cosima a raison. Si elle ne t'avait pas retrouvée à temps, Cymera serait venue réclamer ton âme. « Mais je te le répète : il ne m'arrivera rien. Je serai mieux préparée. » Gamine insistante. Si tu n'as nul besoin de son approbation pour y retourner, tu préfères néanmoins qu'elle te la donne. Afin que l'automnale puisse te laisser partir l'esprit tranquille plutôt que de s'inquiéter inutilement — elle le sait, que t'aimes flirter avec la Mort. Que t'as toujours eu tendance à te mettre en danger comme pour te prouver que ton cœur bat encore sous ta poitrine. Gamine qui s'est vue mourir plus d'une fois, qui a parfois l'impression de n'être plus qu'une coquille vide. « Ça suffirait pour te rassurer ? » Sans doute pas. Mais c'est là tout ce que t'es capable de lui offrir. La promesse que tout ira bien et que tu lui reviendras en vie. Et à ce jour, tu n'as jamais failli à ton devoir. « Tu sais très bien que je n'suis pas du genre à te mentir. » T'es pourtant une menteuse hors pair, Aska. Et pourtant, t'as toujours estimé que tu devais la vérité à tes rares amis.