we were a cautionary tale ✧ sin

we were a

cautionary tale

before we were a tragedy

La lumière du jour lui effleure les yeux et pendant une fraction de seconde, tout devient orange vif sous ses paupières.

C'est presque une surprise, de ne pas sentir le tissu élimé de son hamac dans son dos et le renflement inégale des coussins. Il ne s'en plaint pas. Son dos non plus. Pas de réveil impromptu au milieu de la nuit quand le fracas des affrontements et l'écho des éclats de voix résonnent jusqu'au renoncement de son refuge, quand le gargouillis désagréable des soulards précède la bille qui leur remonte jusqu'aux lèvres - Oh, t'es là gamin? Il s'y était fait Jin, au désordre constant et à l'insalubrité de Sombrerue, à cette vie un peu trop crue propre à cette ville prête à dévorer chaque entrelacs de votre peau nue. Talevir et sa misère, à son ciel qui se parait toujours des couleurs les plus laides.

Mais aujourd'hui, aujourd'hui, Jin n'est pas chez lui.
Ni même à Talevir - l'air est trop doux pour qu'il puisse en douter, exempt de cette poigne ineffable propre au désert et à ses dunes infernales. Sa tête roule sur le côté, ses bras s'étirent, paresseusement, dans un bâillement étouffé qui se prolonge jusqu'à ce qu'il sente ses os craquer. Jin soulève ses paupières dans une lenteur incroyable, ses mèches matinales soulevés en grand épis corbeaux. L'arrête de la poutre contre laquelle il avait appuyé son visage lui chiffonne les joues et y trace une longue ride rouge perpendiculaire. Chat de gouttière aux yeux gonflés qui n'aurait sans doute rien eu contre l'idée de s'y attarder. De s'assoupit encore un peu, bercé par les odeurs de gouache et de peinture à l'huile. Avec cette étrange certitude d'être accompagné malgré le silence régnant dans l'atelier.

Les toiles éparpillés de ci de là explosent des teintes colorés que le fae avait jadis apprécié. Des paysages oubliés qui avaient un jour jonchés les murs de son foyer. Se redressant avec une raideur dans la nuque, douce et amère fatigue de ne rien faire, sa nouvelle conclusion fut que l'endroit lui était curieusement familier. Mais il peinait, l'esprit singulièrement embrumé, à croire qu'il s'était assoupie depuis une éternité - ou tout au contraire que ses songes n'avaient pu que brièvement le capturer, le retenir prisonnier, éloigné de la morne réalité.

Il ne lui faut pourtant que peu de temps pour le trouver Sung qui, pinceau à la main, ses habits tâchés de rouge et d'azur, s'échine sur une de ses oeuvres dans un de ces plis de concentrations dont lui seul était capable. Jin incline son menton, et maintenant que les derniers évènements lui reviennent en tête - Iseul et ses retards perpétuels, son frère qui l'avait invité à entrer en attendant que la jeune femme daigne se montrer - le coin de sa bouche commence à rebiquer, tout doucement, comme tirer par un fil. Avant que le jeune homme se penche en avant pour caler son menton sur l'épaule de son cadet, les paupières plissés dans une grotesque imitation de ces critiques d'art dont la sensibilité artistique lui échappait.

— C'est très... vivant, monsieur Sung. Oui vraiment "puissant".

Il lui ébouriffe les cheveux d'une main avant de se laisser tomber au pied de son tabouret et de poser son menton sur son genou, une jambe ramener contre son torse, guettant un désordre qui ne vient pas.

— Merci de m'avoir laissé dormir ici, j'aurai pu attendre ta soeur encore longtemps.

Reproche qui n'en était même pas vraiment un. Il s'y était usé Jin, à l'excentricité d'Iseul et à sa spontanéité, à son incapacité à être calme et organisé, brouillon qui ne parvenait jamais à achever les tâches qu'elle avait un jour commencé. Tout le contraire de son frère, qui semblait toujours prompt à la recadrer, à prudemment l'orienter par crainte sans doute de la voir trébucher. Qu'aurait-elle fait Iseul, sans la présence rassurante de Sung? Sans son parfait complément qui la protégeait à chaque instant?

— T'es sûr de pas vouloir venir avec nous d'ailleurs?

@MADE BY ice and fire.

hold the summer in your hands,
'til the summer turns to sand

(➢)
ft. @hyo jin lee
(crédits : managarm, atlantis)

Son pinceau glisse doucement sur la toile qui se remplie de touches colorées. Ses gestes sont lents et délicats. Sung s’applique, concentré sur l’image qu’il a en tête et qu’il tente de reproduire. S’il préfère la peinture à toutes les autres formes sur lesquelles il expérimente, c’est parce que les couleurs et les formes qu’il leur donne lui permettent de traduire sur la toile toutes les émotions qu’il souhaite. Comme dans son cœur où les sentiments s’entremêlent et se mélangent, se dissipent et s’accrochent à des souvenirs parfois brumeux, les couleurs se combinent et se croisent d’une nouvelle manière à chaque fois. Tout est flou, un peu approximatif mais prend sens finalement lorsque son travail est terminé. S’il s’applique toujours, il a l’impression que ce n’est qu’avec la peinture que ce n’est pas grave s’il se laisse porter plus loin que ses idées, parce qu’il n’a jamais d’image très précise de ce qu’il souhaite faire, seulement des émotions qu’il aimerait reproduire, des lieux à ne pas oublier, des pensées à évoquer, sans vraiment savoir comment. Alors Sung se laisse porter par son cœur et le hasard parfois, attendant de voir où son pinceau le mènera.
La fatigue s’accroche encore un peu à lui, parce qu’il s’est couché trop tard et réveillé trop tôt. Il aurait pu dormir plus longtemps, mais en ouvrant les yeux tout à l’heure il a su qu’il n’aurait plus le temps de rêver, la lumière du jour commençant déjà à s’installer doucement dans la pièce, prête à l’empêcher de s’assoupir à nouveau. Il a dormi dans la chambre d’Iseul et, malgré qu’elle ne soit pas là, a laissé les volets ouverts, au cas où elle rentrerait plus tard, pour ne pas toucher à ses habitudes, pour ne pas imposer les siennes. Après avoir vérifié que Jin dormait toujours dans la chambre qu’il lui avait laissé, il était parti retrouver le cœur de l’atelier pour peindre dans le silence du matin. C’est à l’aube ou lorsque la nuit tombe qu’il préfère travailler, quand le ciel se pare de milles couleurs, lorsqu’il peut sentir que la ville change d’atmosphère, alors que les passants se remplacent, certains partant se coucher quand d’autres se réveillent tout juste. Il y a quelque chose d’apaisant à voir en quelques instant tout se transformer autour de lui, alors qu’il reste là.
La lumière illumine de plus en plus la pièce, le temps s’écoule doucement. Les couleurs se mélangent et se transforment sur sa palette lorsqu’il sent la tête de Jin contre son épaule.
— C'est très... vivant, monsieur Sung. Oui vraiment "puissant".
Il rigole doucement alors que ses yeux se posent sur le visage encore fatigué qui s'installe à ses côtés. Il n’a jamais vraiment compris comment les critiques trouvaient si facilement des choses à dire, ne s’inquiétant pas vraiment de savoir si elles sont réalistes ou non. Sung ne sait pas poser de mots sur son travail, ils sonnent toujours inexactes, un peu de travers, comme s’ils manquaient quelque chose d’essentiel qui resterait caché là, incapable de se traduire correctement. Cela n’a, de toute façon, que peu d’importance. Il n’a aucun moyen de faire une copie parfaite de ce qui se trouve dans son cœur, alors tout repose dans l’interprétation des autres. Ils peuvent y poser les mots qu’ils veulent, selon ce qu’ils souhaitent voir ou ressentir.
— Merci de m'avoir laissé dormir ici, j'aurai pu attendre ta soeur encore longtemps.
— C’est bien pour ça que j'ai préféré que tu restes ici cette nuit. Tu as bien dormi au moins ?
Toutes les choses glissent sur Iseul, qui se laisse porter par sa légèreté. Les informations s’envolent et s’évanouissent de son esprit, avant de lui revenir parfois trop tard. Mais Jin, tout comme lui, la connait bien assez pour savoir que rien n’y changera et que bientôt elle réapparaitra faisant oublier les désagréments passagers avec toute sa spontanéité.
— T'es sûr de pas vouloir venir avec nous d'ailleurs?
Il secoue doucement la tête en guise de première réponse, pointant avec son pinceau tout un tas de palettes de fortunes, de tissus et pinceaux plein de peinture séchée, certains ne pouvant plus être utilisés, d’autres à simplement nettoyer. S’il ne s’éparpille pas dans tous les sens, s’il s’applique toujours dans son travail, il se laisse parfois absorber par ses idées jusqu’à ce que la fatigue surgisse, et qu’il soit alors trop tard pour tout remettre à sa place.
— Je dois encore tout ranger et nettoyer, et je n’aurai plus le temps demain, alors je viendrai la prochaine fois. Au moins je peux rattraper le temps que j’aurais dû passer avec toi en attendant qu’Iseul soit là.
Un sourire s’installe sur ses lèvres pour ne plus les quitter, comme à chaque fois qu'il retrouve Jin, quel que soit le temps qu'il lui faut pour le revoir, comme s'il n'était jamais loin.
—Est-ce que tu veux m’aider ? Il demande tout doucement en désignant la toile devant ses yeux.
Peut-être alors qu’elle ne ressemblera plus à ce qu’il imaginait, mais il aura tout le temps de reprendre ses idées plus tard, parce qu’il aimerait mieux savoir quelles couleurs reflètent le cœur de Jin, lui qui a toujours su apaiser le sien.

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before we were a tragedy

Jin aimait le calme de Sung.
Il y avait de tout dans le murmure de sa voix. Une douceur qu'on redécouvrait à chaque fois, un peu de sérieux aussi, un parfum de lui, l'arôme de ses sourires. Il aimait en voler les sonorités, s'y laisser bercer lorsque son monde semblait s'effondrer. Sung avait une présence curieusement réconfortante contre laquelle on aimait relâcher le fil de notre méfiance, pour s'en gorger une fois encore, espoir faisant d'y bâtir le socle de notre apaisement. C'est un drôle d'abandon auquel il ne trouvait aucune explication. A la fois si absurde, si spontané, qu'il n'avait en réalité jamais vraiment prit la peine de s'y attarder. C'est tant et si peu. Si risible et si capricieux.
Il y a la tête de Jin qui vient s'appuyer contre la hanche du fae, qui d'un bâillement étouffé marque le confort de la nuit qu'il venait de passer. Si sa relation avec Tan lui avait jusqu'alors permis de retrouver un certain niveau de vie, il n'y avait rien de plus naturel pour lui qu'une soirée passer en compagnie de son ami. Lorsque Jin abandonnait sa prudence et son inconfort sur le pas de leur porte. Lorsqu'innocemment, ils reprenaient le fil interrompu de leurs interactions - comme s'ils ne s'étaient jamais quitter, comme s'il n'y avait rien de plus certain que cette immuabilité.

— D'habitude je dors dans un hamac dans une rue, à côté cette chambre c'est un palais.

C'était presque vrai. Ou tout du moins, ça avait été vrai. Avant Tan. Avant cette première et dernière nuit passé entre ses bras. Est-ce qu'il comprendrait Sung, si Jin venir à lui expliquer? Que pour la première fois, il s'était sincèrement surpris à aimer. A véritablement s'attacher, à vivre son premier baiser. Est-ce qu'il le jugerait s'il lui disait? Que son amour à lui était imparfait, qu'horreur suprême, il s'agissait même d'un humain. Mais qu'il n'y avait pas que ça - qu'il ne se résumait pas à ça. Que son capitaine à lui, avait des cauchemars plein le front, qu'ils le grignotaient de l'intérieur même une fois ses yeux ouverts. Il était fragile sous sa carapace, sa belle assurance, sa froideur et son apparente prestance, ne sont qu'une infime partie de ses facettes. Surement les plus superficielles. Son Tan, il lui attrape la main du bout des doigts - comme s'il craignait qu'il ne le rejette, ou pire, qu'il ne s'éloigne. Il dépose une couverture sur ses épaules en étant persuadé qu'il n'y prête pas attention. Et s'inquiète pour lui à chaque fois qu'il passe la porte. Tan qui l'étouffe de son affection. Et Jin qui s'en fou de mourir asphyxié, pour peux qu'il puisse encore se surprendre à se sentir autant aimé.

— Tu sais, on peut aussi faire quelque chose ensemble après. Je n'ai pas à repartir sur Talevir tous de suite.

Mais il ne pouvait pas - évidemment qu'il ne s'y aventurerait pas. Même pinçait quelque chose dans sa poitrine de ne pas pouvoir lui dire. Jin coupable qui étouffait la vague de sa culpabilité par cette effusion de proximité. De sa tête appuyé contre sa hanche qui se moquait bien des tabourets éparpillés. Il y aurait trop de chose à dire si ses yeux venaient à croiser les siens, trop de bonheur et de crainte à esquisser sans qu'il ne puisse pleinement les relater. Alors Jin préférait les contourner, à être tout sauf le reflet de son honnêteté.
Il y avait des joies que l'on souhaiterait pouvoir crier au monde entier sans jamais avoir le droit de s'y abandonner.

— Du bleu et du vert, comme le lac qu'il y avait derrière chez moi. Tu t'en souviens sûrement pas, mais gamin on s'y était baigner une fois.

C'était flou, un peu confus, cet après midi passé à patauger avec le bambin que Sung avait été. Mais il l'avait gravé, quelque part sur la courbe de leur presque éternité comme un souvenir à conserver. Quelque chose de précieux qui valait la peine d'être rappelé.

— Mais je ne suis surement pas la personne la mieux indiqué pour parler d'art. Mes capacités se limitent à regarder une toile et décidé si je la trouve jolie ou pas.

@MADE BY ice and fire.

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ft. @hyo jin lee
(crédits : managarm, atlantis)

Lorsqu’il regarde en arrière, il y a tout un tas de visages qu’il a eu le temps de croiser, parfois le temps d’un instant, pour quelques jours, ou quelques mois. Du jour au lendemain ils se volatilisent pour appartenir au passé. Mais il sait que Jin n’est pas de ces rencontres éphémères, et que pour longtemps encore son chemin retrouvera toujours le sien. Et ça le rassure de savoir que les au revoir ne sont jamais des adieux.
— D'habitude je dors dans un hamac dans une rue, à côté cette chambre c'est un palais.
Il sourit un peu triste. Il sait à quoi ressemblent ces rues et ces refuges qui n’offrent jamais de véritable sommeil, à peine du repos, que l’on retrouve parce qu’on a rien d’autre, tout comme il sait la chance qu’il a de pouvoir vivre ici pour le moment.
— Tu sais, on peut aussi faire quelque chose ensemble après. Je n'ai pas à repartir sur Talevir tous de suite.
— Alors on fera ça. De toute façon, tu peux rester ici aussi longtemps que tu veux.
Il y avait toujours comme un voile calme et apaisant qui semblait venir se poser au-dessus de lui lorsque Jin était là. Maintenant qu’il ne pouvait plus le voir aussi souvent, toujours un peu moins longtemps qu’avant, la simplicité de ces instants lui manquait.
— Du bleu et du vert, comme le lac qu'il y avait derrière chez moi. Tu t'en souviens sûrement pas, mais gamin on s'y était baigner une fois.
Il secoue simplement la tête en guise de réponse parce qu’il aimerait pouvoir répondre qu’évidemment il s’en souvient, de ce moment sûrement plein de candeur et de simplicité, qu’il le garde dans son cœur parmi les souvenirs paisibles de l’enfance. Mais lorsqu’il essaye de remonter dans sa mémoire pour revenir au début de sa vie, il n’y a plus aucune trace de Mysrathan. Il sait que Jin aurait dû faire partie de ces souvenirs parce qu’Iseul lui a dit, lorsqu’ils se sont retrouvés alors que lui pensait le rencontrer pour la première fois. Il ne peut compter que sur leurs histoires à eux, pour disposer par petits bouts du début de la sienne. Peut-être que c’est parce qu’il a toujours été là, même avant qu’il s’en souvienne, que Jin toujours revient éclairer ses journées. Alors que sa tête s’appuye contre lui, il sent bien que ses pensées l’emportent un peu loin d’ici. Peut-être est-ce le sommeil encore qui s’accroche à lui, ou peut-être que c’est autre chose. Il n’en sait rien mais Sung ne demande rien, parce que ce n’est pas à lui de le faire.
— Mais je ne suis surement pas la personne la mieux indiqué pour parler d'art. Mes capacités se limitent à regarder une toile et décidé si je la trouve jolie ou pas.
— C’est tout ce qui compte, de savoir si c’est joli, si ça fait résonner quelque-chose, quelque-part, si ça te rappelle des souvenirs. Donc tu es tout à fait la personne indiquée pour m’aider.
Sung ne créé qu’en s’appuyant sur ça, sur ce qu’il trouve dans son cœur, selon ce qui lui vient. On ne lui a rien apprit sur le monde de l’art, dans lequel il s’est retrouvé un peu par hasard. Il n’y a qu’auprès d’Iseul qu’il peut apprendre, en l’observant, en créant à ses côtés et s’inspirant de son esprit d’invention bien plus grand que le sien, ou de sa créativité qui part dans tous les sens, jusqu’aux recoins les plus colorés. Sûrement que sa fausse identité est parée de la profession d’artiste parce qu’il n’aurait rien su faire d’autre. Il ne sait pas s’il fait réellement partie de ce monde qu’il connaît à peine. Mais est-ce vraiment important ? Le seul monde qu’il connaît par cœur c’est celui de la fuite, qui lui laisse à peine le temps de découvrir des choses, avant qu’elles ne s’envolent parce qu’il faut toujours partir, s’en aller quelque part, en laissant l’exploration derrière-soi.
— Du bleu et du vert alors. Il répète les mots de son ami alors qu’il commence à mélanger les couleurs sur sa palette, le bleu s’éclaircissant jusqu’à ressembler au ciel d’été.

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Il se sentait comme immergé au milieu d'un été caniculaire.
Il pouvait le sentir dans la brise qui peinait à naitre, dans la chaleur qu'il s'imaginait. Dans le bleu et le vert entremêlé qui doucement s'esquissait sur le dessin de sa toile - dans ses jambes étendues et la paresse qui alourdissait chacun de ses muscles, dans ses regards sans arômes qui voguait de pièces en pièces sans jamais délivrer une seule histoire. Parce qu'elle s'était scellée dans leurs fuites, dans la répétition de leur escapade, dans l'inconstance de leur existence. A quoi bon allonger le sablier de leur vie s'il n'y avait que l'écho du vide pour y apporter un sens? A Sung et Iseul qui jamais ne pouvaient demeurer bien longtemps sous le même toit. A Jin qui peinait à en franchir le pas. Qui en oubliait parfois, ce qu'était avoir un chez sois.

— Je sais.

Il n'avait jamais eu a en douter, jamais eu à s'en inquiéter, de la sincérité de leur amitié, de cette relation qui contrairement à tout le reste, prenait des airs d'éternité. Peut être devait-il sa confiance dans l'aisance qu'ils avaient à se retrouver. Dans la manière dont Sung l'avait accueilli malgré les trous noirs de sa mémoire. Dans son calme inchangé, dans cette manière toute naturel qu'il avait de s'en distinguer. Qu'aurait-il à gagner de ses souvenirs à lui? Aux éclats de Jin et aux valses de ses soupirs? Etait-ce là le dessein de ses caprices d'artiste? Des bris de rêves couché sur papier auquel une part de sois chercherait à se raccrocher? Il n'aurait su le dire ou même expliqué ce qui le captivait. Un passé fantasmé coucher sur le blanc immaculé ou le calme qui en résultait. Il n'y avait plus besoin de penser lorsque son regard embrassait la course du bleu mourant sur la courbe de son imaginaire. Il n'y avait plus qu'à s'y laisser bercer, dans l'histoire silencieuse qu'il y contait. Sung mué en charmeur de serpent et en dompteur de rêve - qui faisait poindre sur ses lèvres un sourire qui parfois peinait à naitre.

— Être toujours le bienvenu ici, c'est une des rares choses dont je sois certains.

Lui qui parfois peinait à se comprendre lui même, à donner un sens aux décisions qu'il prenait - aux impulsions auxquels il succombait. Car si Sung peignait le ciel de ses souvenirs d'un bleu céruléen, Jin peinait à ne pas percevoir le gris du sien. Un gris un peu trop clair, encore cotonneux, qui accompagnait sans doute les premiers sursauts de ses émois amoureux. Il n'y voyait que des lueurs éclatantes Jin, lorsque vers lui ses sourires s'avançaient, lorsque naturellement ses bras l'enlaçaient. Avant de se heurter à la contradiction de leur existence, à l'hérésie de leur relation, à la trahison de leur sentiment.

— Enfin, c'est bien la première fois qu'on réclame mon aide pour ces choses là.

Mais il était sans nul doute trop tard pour ça, les regrets saupoudrés à coup de raison. Il n'y avait que la folie pour le pousser à croire qu'il pouvait ainsi s'exposer sans prendre le risque de s'y écorcher. Qu'une naïveté criante pour qu'il présuppose du bienfondé de leur relation. A ne pas simplement réaliser que l'humain s'éteindrait avant même que son visage n'ait la liberté de faner et qu'il n'y aurait que lui pour pleurer l'homme qu'il avait été.

— Tu n'as pas quelqu'un d'autres pour t'inspirer? Iseul et ses folies mise à part évidemment.

Parce qu'il avait Jin, qui lui inspirerait un millier de toiles ou tout autant d'éclat, si son coeur avait un jour été ouvert à l'art et à son oeil ingrat.

@MADE BY ice and fire.